4 ans après la LOM, la gouvernance des mobilités continue sa transition à impacts positifs
100 % des territoires sont couverts par une AOM (Autorité Organisatrice de la Mobilité) et toutes les régions ont effectués le travail de définition des bassins (à l’exception de la Bretagne) avec un peu plus de 20% des comités de partenaires en place.
Avec 712 AOM activées, la France s’engage vers une mobilité quotidienne accessible et durable, reflétant une évolution significative depuis l’adoption de la LOM. Elle prendra encore quelques années pour que tous les outils soient mis en place. Elle s’oriente donc vers une décennie de transformation, avec l’ambition de devenir un modèle de mobilité durable, inclusive et résiliente, alignée sur les objectifs climatiques globaux et capable de répondre efficacement aux besoins de tous ses citoyens.
Lors de la rencontre sur les Mobilités organisée par le CEREMA le 18 janvier 2024, Alexandre Fabry a présenté un bilan concernant l’adoption de nouvelles compétences et l’établissement d’une gouvernance visant à rendre les transports quotidiens plus accessibles, économiques et écologiques selon le selon le principe de subsidiarité :
« Une responsabilité doit être prise par le plus petit niveau d’autorité publique compétent pour résoudre le problème. »
Suivant la réforme du système ferroviaire initiée en 2018, la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM, loi n°2019-1428 du 24 décembre 2019) marque une étape cruciale dans la rénovation des politiques de mobilité. Cette législation vise principalement à :
- Éradiquer les trop nombreux « déserts de mobilité » (ou « zones blanches ») qui parsèment le territoire,
- Favoriser l’apparition de solutions de mobilité innovantes,
- Accélérer la transition vers des moyens de transport plus respectueux de l’environnement,
- Introduire une stratégie novatrice de planification des investissements dans le secteur,
- Mettre en place une gamme de mesures spécifiques pour le bon déroulement des opérations dans le domaine des transports.
Ce cadre législatif entend ainsi remodeler en profondeur l’approche des déplacements au quotidien, en proposant une vision renouvelée et durable de la mobilité.
Tous les territoires sont couverts par une (AOM) Autorité organisatrice des Mobilités
La LOM a instauré un cadre novateur pour l’organisation des transports et des services de mobilité sur l’ensemble du territoire français. Cette loi ambitionne d’assurer une couverture complète du pays par des Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM) à l’été 2021, des entités dotées de la responsabilité de coordonner et de mettre en œuvre diverses offres de mobilité adaptées aux particularités locales. Parmi les services pouvant être orchestrés par les AOM figurent le transport public régulier ou à la demande, le transport scolaire, les mobilités actives et partagées (telles que le covoiturage, l’autopartage, la location de vélos, etc.), la mobilité solidaire, des conseils en mobilité pour les personnes en situation de vulnérabilité et les grands générateurs de flux, ainsi que la logistique urbaine lorsque le secteur privé ne répond pas aux besoins.
Les AOM ont le privilège de sélectionner les services les plus pertinents pour leur territoire, permettant une gestion sur mesure de la mobilité (aux plus près des besoins des citoyens). Les entités requises pour assumer le rôle d’AOM incluent les communautés d’agglomération, les communautés urbaines, les métropoles, et spécifiquement la métropole de Lyon. Les syndicats mixtes et les PETR (pôles d’équilibre territorial et ruraux) peuvent également obtenir cette compétence par transfert de leurs membres. Pour les communautés de communes, l’adoption de cette compétence n’est pas automatique mais elles peuvent choisir de devenir AOM ou laisser la région prendre cette responsabilité à leur place, en plus de pouvoir soutenir le développement de mobilités actives et partagées, et d’offrir des aides à la mobilité.
La région joue un rôle clé en tant qu’AOM régionale (AOMR), responsable de la coordination des services de mobilité d’intérêt régional et agissant comme autorité principale de mobilité sur son territoire. Elle peut également assumer les fonctions d’AOM locale en substitution pour les communautés de communes n’ayant pas pris cette compétence.
Avec l’application de la LOM, toutes les régions et communautés de communes sont désormais intégrées dans un réseau d’AOM, garantissant une gestion unifiée et efficace de la mobilité sur le territoire national.
À ce jour, la France compte 712 AOM locales, dont 469 communautés de communes, avec une présence significative de régions agissant en tant qu’AOM de substitution.
L’Île-de-France se distingue par sa structure unique, Île-de-France Mobilités (IDFM), qui combine les fonctions d’une AOM et d’une région, assurant une gestion cohérente de la mobilité dans cette zone dense.
Maëlle Ballandra, active dans la région Hauts-de-France, met en avant le cas de la Communauté de communes du Pays de Lumbres, qui exerce la fonction d’Autorité Organisatrice de la Mobilité (AOM) depuis juin 2021, soit deux ans après l’adoption de la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM). Cette communauté suit une politique de mobilité articulée autour du Plan Local d’Urbanisme Intercommunal (PLUi), validé en 2019, et détaillée dans le Plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET), ratifié en mars 2020.
Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes (AURA), l’autorité AOM a été établie en juillet 2022, suite à une délégation de compétences formalisée par une convention. Cette convention, prévue pour une durée de cinq ans (2022-2027), couvre un éventail de services, incluant le transport régulier de personnes, le transport à la demande, ainsi que les initiatives de mobilités actives, partagées, et solidaires.
Les bassins de Mobilités, définis par la Région et les acteurs locaux de mobilités sont quasiment tous délibérés
Les bassins de mobilité sont conçus comme des secteurs géographiques spécifiques, établis pour faciliter la coordination des initiatives de mobilité à un niveau régional. Hors de la région Île-de-France, la mise en œuvre de la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) a entraîné la création de ces bassins à travers une démarche collaborative impliquant les Autorités Organisatrices de Mobilité (AOM), les syndicats mixtes, et les conseils départementaux. Ces zones définies jouent un rôle clé dans la formulation de contrats opérationnels de mobilité (COM) et la mise en place de Plans d’Action communs destinés à promouvoir la Mobilité Solidaire (PAMS), visant à améliorer l’accessibilité et l’efficience des systèmes de transport au bénéfice de tous les usagers.
Sur le territoire national, l’observatoire de France Mobilités répertorie aujourd’hui 236 bassins.
Emmanuel Leguay, dans la région des Pays de la Loire, rapporte la définition de 16 zones géographiques, où 67 des 69 Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) ont adopté le statut d’Autorité Organisatrice de la Mobilité (AOM). Ces communautés de communes montrent des degrés variés de développement en termes de compétences liées à la mobilité, tout en bénéficiant d’une forte adhésion à cette initiative.
Les contrats opérationnels de mobilité, outil de planification du bassin, sont en cours de définition
Les contrats opérationnels de mobilité (COM) forment un pilier essentiel pour la synchronisation des initiatives de mobilité à l’échelle locale, impliquant une collaboration étroite entre les Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM), la région, et d’autres acteurs clés tels que les gestionnaires d’infrastructures de transport. Ces contrats visent à harmoniser les efforts entre les différentes parties prenantes au sein des bassins de mobilité, zones géographiques spécifiquement désignées par la région pour optimiser la coordination des politiques de transport.
Institués par la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), les COM engagent divers intervenants, notamment les AOM, les syndicats mixtes, les départements, ainsi que les opérateurs des gares et des pôles d’échanges multimodaux, en vue d’une gestion intégrée et efficace de la mobilité. Selon les particularités régionales, ces contrats peuvent aussi inclure des EPCI, des régions adjacentes ou d’autres partenaires comme les opérateurs de transport et les municipalités.
Les COM abordent divers aspects cruciaux pour l’amélioration de la mobilité, incluant l’intermodalité, la tarification, l’information voyageur, et l’accès aux services de transport. Ils visent également à soutenir le développement et l’optimisation des infrastructures de transport, comme les pôles d’échanges multimodaux et les aires de mobilité, avec un accent particulier sur les zones rurales. Ces contrats couvrent la gestion des services en cas d’incidents pour garantir la continuité des transports, le partage des bonnes pratiques de mobilité et le renforcement de la cohésion sociale et territoriale. Ils facilitent aussi la mise en place d’infrastructures favorisant les mobilités douces et partagées.
Nicolas Pitout indique que huit COM ont déjà été mis en œuvre, avec d’autres en cours d’élaboration. Par exemple, le premier COM signé dans le Bassin Nantais a instauré un cadre de collaboration pour cinq ans dès mars 2023, incorporant 20 actions spécifiques, telles que le développement d’un service express métropolitain et de réseaux cyclables.
Emmanuel Leguay souligne l’avancement des COM dans la région des Pays de la Loire, avec quatre contrats déjà signés et les 11 autres sont attendus pour les années 2024 et 2025. Chaque COM étant adapté aux besoins spécifiques de son bassin et signé par un éventail d’acteurs régionaux. Il met en avant le processus de création du COM du Bassin Angevin, un effort collaboratif étendu sur 15 mois, illustrant la complexité et les défis liés à la mise en place de ces contrats, notamment en termes de financement et de cadre juridique, malgré les objectifs ambitieux fixés par la LOM.
Les comités des partenaires sont en cours d’installation
Le comité des partenaires représente un forum de consultation local, formé par l’Autorité Organisatrice de la Mobilité (AOM) et des délégués représentant les employeurs, la population locale et les utilisateurs des services de transport. Ce comité joue un rôle consultatif sur divers aspects de la stratégie de mobilité développée par l’AOM, y compris la planification et l’application du versement mobilité. La législation « Climat et résilience » a amplifié l’importance de ces comités, en introduisant notamment l’innovation de l’intégration de citoyens désignés par tirage au sort.
D’après la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), la création d’un comité des partenaires est devenue une exigence pour les AOM, qui doivent y inclure au minimum des représentants des usagers et des habitants ainsi que des employeurs, afin de garantir leur participation active dans l’élaboration des politiques de mobilité territoriale.
En 2024, environ 20% des AOM locales avaient établi leur comité des partenaires, tandis que dans 20% des cas, le processus était encore en cours, selon une enquête menée par Intercommunalités de France en juin 2022. De plus, la mise en place d’un comité des partenaires est également obligatoire pour les régions, avec déjà 10 régions ayant formé leur propre comité des partenaires régional, comme le rapporte un recensement du GART en janvier 2023.
Dans la région Pays-de-la-Loire, Emmanuel Leguay met en lumière plusieurs structures collaboratives:
- Le Comité Régional des Partenaires, qui se réunit annuellement.
- Des instances dédiées à l’élaboration et au suivi des Contrats Opérationnels de Mobilité (COM) au niveau de chaque bassin de mobilité, comprenant des Comités de pilotage et des Comités techniques.
- Les Comités de Lignes.
- Les Conférences Départementales des Transports Scolaires.
- Un comité de suivi dédié à l’accessibilité du réseau de transport régional.
- La Conférence Régionale des AOM, qui s’est tenue en 2021 pour initier cette démarche collaborative.
Une dizaine de nouveaux plans de mobilités établis
Le plan de mobilité est un outil stratégique élaboré par les Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM) pour orchestrer l’ensemble des déplacements des personnes et le transport des marchandises au sein de leur territoire. Ce document prend en compte la complexité et la diversité territoriale ainsi que les besoins spécifiques de la population, en collaboration étroite avec les entités territoriales voisines. Son objectif est de réduire les émissions polluantes du secteur des transports, en alignement avec les objectifs climatiques nationaux, et de lutter contre la pollution atmosphérique et sonore, tout en veillant à la protection de la biodiversité.
Les AOM, dans leur rôle de planificateurs et d’évaluateurs de la politique de mobilité, impliquent activement l’ensemble des parties prenantes dans le processus, contribuant ainsi directement aux efforts de mitigation du changement climatique, de réduction de la pollution de l’air et sonore, et de limitation de l’étalement urbain. Selon les besoins et le contexte, une AOM peut décider d’élaborer un plan de mobilité complet ou un plan simplifié, ou encore adopter une autre démarche telle qu’une charte ou une feuille de route.
La mise en place d’un plan de mobilité (PDM) est obligatoire pour les AOM desservant ou intersectant une agglomération de plus de 100 000 habitants, conformément à un arrêté basé sur les calculs de l’INSEE du 22 décembre 2021. Toutefois, cette obligation ne s’étend pas aux communautés de communes ni aux régions, sauf mention explicite dans l’arrêté. Les plans de mobilité simplifiés restent facultatifs.
Il est crucial d’assurer la compatibilité des plans de mobilité avec les documents d’orientation supérieurs, tels que le SRADDET (Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires.), le PPA (Plan de Protection de l’Atmosphère), et le PCAET (Plan Climat Air Énergie Territorial), cette vérification devant être effectuée tous les cinq ans. Néanmoins, la révision de ces documents ne déclenche pas automatiquement une mise à jour du PDM, à l’exception des cas où le PDM doit s’aligner sur le SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) dans un délai de trois ans.
La relation entre le plan de mobilité et le PCAET varie en fonction de la couverture territoriale de chacun, établissant une logique de compatibilité ou de prise en compte selon les cas. Cela est particulièrement pertinent lorsque l’AOM est un syndicat de transport ou un PETR (Pôle d’Équilibre Territorial et Rural), où plusieurs PCAET peuvent coexister.
Sur le plan de l’urbanisme, le plan de mobilité a une influence directe sur le PLU (Plan Local d’Urbanisme), définissant les zones privilégiées pour le développement des transports publics et les normes de stationnement, tant pour les véhicules motorisés que non motorisés.
Maëlle Ballandra, représentant la Communauté de communes du Pays de Lumbres en région Hauts-de-France, souligne l’importance du Plan Local d’Urbanisme Intercommunal (PLUi) et du Plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET), ratifiés respectivement en 2019 et en 2020, comme fondements de leur politique de mobilité.
Entre 2020 et 2022, suite à la loi LOM, une dizaine de nouveaux plans de mobilité ont été établis parmi les 450 existants, marquant une progression significative dans l’adoption de stratégies de mobilité durable à travers la France.
Le travail de création des Plans d’Action en commun en faveur de la Mobilité Solidaire (PAMS) est lancé
La mise en œuvre du Plan d’Action pour la Mobilité Solidaire (PAMS) est en cours d’élaboration, conformément aux directives de la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), même si aucun document n’est adopté à ce jour sur le territoire national . Ce plan vise à améliorer l’accessibilité aux transports pour les individus les plus vulnérables, en s’appuyant sur une collaboration étroite entre la région, en sa qualité de leader en matière de mobilité, les départements, et les Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM) au sein de chaque bassin de mobilité.
Dans la région Pays-de-la-Loire, et plus spécifiquement pour le bassin Angevin, Emmanuel Leguay met en avant la détermination à concrétiser le PAMS dans le cadre du Contrat Opérationnel de Mobilité (COM). Ce projet ambitieux comprend 23 actions réparties sur 8 domaines prioritaires, parmi lesquels la mobilité solidaire occupe une place centrale, témoignant de l’engagement régional à renforcer l’inclusion et l’accessibilité dans le domaine des transports.
Plusieurs années seront encore nécessaires pour avoir une mise en place complète de la gouvernance (et des outils) dans tous les territoires
La Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) a initié une ère nouvelle dans l’aménagement du territoire et la gestion des transports en France, en mettant en place un cadre législatif et opérationnel innovant pour répondre aux défis contemporains de mobilité. En se projetant vers l’avenir, on peut anticiper une consolidation des acquis de ces premières années, avec une augmentation significative du nombre d’AOM actives et une multiplication des plans de mobilité adaptés aux spécificités locales. La généralisation des comités des partenaires et l’élargissement des contrats opérationnels de mobilité marqueront une étape supplémentaire dans la démocratisation de la gestion des transports, en intégrant plus étroitement les citoyens et les acteurs locaux dans la conception des politiques de mobilité. La France s’oriente donc vers une décennie de transformation, avec l’ambition de devenir un modèle de mobilité durable, inclusive et résiliente, alignée sur les objectifs climatiques globaux et capable de répondre efficacement aux besoins de tous ses citoyens.
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